Une préface toujours d’actualité en 2024

SCE,  Introduction : En 2013 paraissait sous la direction du Professeur Istvan Marko le livre ‘Climat : 15 vérités qui dérangent’. Il fut préfacé par l’Ancien Commissaire européen à l’environnement et ancien Ministre italien de l’environnement, Monsieur Carlo Ripa di Meana. En ce début de nouvelle année, le texte de cette préface ’historique’ n’ayant pas pris une seule ride nous le reproduisons entièrement .
N.B. Certains passages ont été mis en gras par SCE.

Carlo Ripa di Meana,
Ancien Commissaire européen en charge de l’environnement

Cet ouvrage que j’ai accepté de préfacer tombe à point nommé parce qu’il permet de m’épargner la rédaction d’un livre que je projetais d’écrire sur l’évolution du climat, sur la politique de réduction des émissions de CO₂ imposé par le protocole de Kyoto et sur les retombées prétendument positives de l’économie verte. 

Sans entrer ici dans les développements passionnants et pleins d’actualité de ce livre d’une grande rigueur intellectuelle, j’aimerais apporter mon éclairage autobiographique. En effet, il m’a été donné, dans une autre vie, de jouer un rôle d’initier une politique environnementale, d’abord au niveau européen et international, et ensuite en Italie. Au cours de ces deux expériences, ma position a progressivement évolué jusqu’à se renverser.

Dans le cadre de mes fonctions officielles, d’abord en tant que Commissaire européen à la Commission durant les deux mandats de Jacques Delors (1985 – 1992), puis en tant que ministre de l’Environnement en Italie dans le gouvernement Amato (1992 – 1993), j’ai œuvré à l’adoption, par la Communauté européenne, de la taxe énergie-carbone destinée à lutter contre le changement climatique d’origine anthropique. Cette politique visait à réduire, par des instruments internationaux, les émissions d’origine humaine de CO₂ dans l’atmosphère. Elle tendait également à ouvrir la voie à des accords, d’abord diplomatiques et ensuite juridiques, comme le Protocole de Kyoto (11 décembre 1997). 

Après quelques années, j’ai fini par adopter une position diamétralement opposée à cette politique, celle qu’on qualifie communément de «climatosceptique ». Je me suis donc opposé à la plupart des propositions contenues dans le document juridique européen consacrant la taxe énergie-carbone, texte dont j’avais pourtant été l’un des initiateurs au sein de la Commission européenne en collaboration avec Klaus Töpfer, le ministre de la République fédérale d’Allemagne, et celle, plus technique, de Laurens Jan Brinkhorst, le Directeur général de l’Environnement, qui devint plus tard ministre à La Haye. J’avais présenté ma proposition lors du Conseil européen de l’environnement en 1992. L’objectif était que la taxe énergie-carbone fût adoptée, quelques mois plus tard, à l’occasion de la Conférence des Nations Unies à Rio de Janeiro, surnommée « Sommet de la Terre » (1-12 Juin 1993). Cependant, elle fût – c’était malheureusement prévisible – boycottée par le président américain George Bush senior.

Je reprends ci-dessous un texte extrait de mon journal intime, texte rédigé au cœur de la bataille que je menais pour promouvoir la taxe énergie-carbone.

« Le sénateur Al Gore, originaire du Tennessee, vint me trouver un jour de Mars 1992 à Bruxelles. Je savais qu’il était l’un des espoirs des Démocrates après une ère républicaine interminable sous les mandats de Reagan et de Bush. Je savais qu’il était un militant écologiste particulièrement bien informé et je savais que sa famille, originaire du Sud s’était illustrée au Sénat. A l’inverse, il ne connaissait de moi qu’une seule chose : le fait que je travaillais à la création de l’Agence européenne pour l’environnement, partiellement inspiré par sa consœur Américaine, la très réputée EPA – Agence de protection de l’environnement – et que j’étais le promoteur d’une fiscalité environnementale consistant en une taxe énergie-carbone. 

Notre rencontre dura beaucoup plus longtemps que prévu. Il adopta d’emblée un ton familier et m’ouvrit les yeux sur ce que nous pouvions attendre de la Conférence des Nations Unies à Rio de Janeiro. Il m’expliqua que George Bush ne prendrait aucun engagement à Rio. En effet, nous allions entrer incessamment en période électorale et les industries pétrolières et automobiles étaient déjà suffisamment agacées par la rigueur du « Clean Air Act « . Al Gore pronostiqua que le président américain s’en tiendrait à  des vœux pieux et à quelques rares engagements, dont aucun ne serait contraignant. Gore ironisa alors notre positionnement européen et me parla de «l’illusion de votre taxe énergie-carbone». Je lui demandai de m’expliquer ce qu’il voulait dire. Je suis sûr, déclara-t-il « que le président Bush va tout faire pour écarter votre proposition par des mesures diplomatiques et politiques de telle sorte qu’elle n’arrive pas à Rio ».

Après quelques mois, le 18 mai 1992 – nous nous retrouvâmes dans l’hémicycle strasbourgeois du Parlement européen. Nous étions tous deux rapporteurs à la Convention de Globe International. A la veille de Rio, Al Gore était déjà candidat à la vice-présidence démocrate avec son colistier Bill Clinton. Je l’ai trouvé plus réservé, moins extraverti : il s’était coulé dans son rôle de candidat. Ce n’était plus l’écologiste fougueux que j’avais rencontré quelques mois auparavant mais un sénateur en campagne. Son livre « Earth in the Balance » était sur le point de paraître en Italie, mais il était clair que, sur son podium à Strasbourg, la seule obsession de Gore était de ne rien dire qui puisse nuire à sa course à la vice-présidence. Je pris la parole immédiatement après lui et je tins le discours que lui n’était pas en mesure de tenir: « Rio risque d’être une parodie ». Bush, à Washington, était en colère, et il confia à Bill Riley, le directeur de l’EPA, qu’il ne pouvait plus supporter les déclarations intempestives de ce « casse-pieds d’Européen à trois noms ».

Al Gore se rendit à Rio (1-12 Juin 1992), où il pesa ses mots et ses engagements. Je restai à Bruxelles. En effet, la veille du Sommet de la Terre, je fus prié, par les gouvernements des États membres, de ne pas tenter d’isoler les Etats-Unis à Rio. Bush leur avait fait comprendre qu’il était en campagne présidentielle et qu’il avait promis à l’industrie américaine de s’opposer aux outrances des écologistes et à leurs contraintes environnementales. Les gouvernements de la Communauté européenne se plièrent à cette pression présidentielle.

Mon action, au cours des trois années précédentes, avait consisté à positionner la Communauté européenne comme le leader de la politique environnementale. Mais, au dernier moment, Kohl, Gonzales, Major, Mitterrand et Delors, désireux de ne pas isoler Bush, décidèrent d’enterrer cette proposition de taxe européenne, qui aurait permis de lutter contre le changement climatique au niveau macro-économique. Quant à Delors, il se rendit à Rio, mais on ne lui accorda pas la parole ».

Depuis le début des années quatre-vingt-dix alors que j’officiais en tant que Commissaire européen à l’environnement, jusqu’à aujourd’hui, je pense, tout au long de ces années, avoir étudié, lu et vérifié beaucoup de choses sur la théorie du changement climatique, telle qu’elle a été formulée, discutée et mise à l’épreuve depuis le Protocole de Kyoto en 1997. Je possède en outre une expertise de première main sur les énergies renouvelables.

Je ne crois plus dans le dogme du réchauffement climatique causé par l’homme et, par conséquent, je ne crois plus à l’origine anthropique de l’effet de serre. Dès lors, je ne crois plus non plus à la théorie qui en découle, propagée ces dernières années par le GIEC, l’organe des Nations Unies destiné à étudier le changement climatique et à démontrer l’origine anthropique du réchauffement global. En effet, selon le GIEC le changement climatique doit être stabilisé par une réduction des gaz à effet de serre dans l’atmosphère et en enfouissant le surplus de CO₂ produit ces dernières années dans des mines abandonnées. En réalité, le climat évolue constamment et cette évolution dépend de nombreux facteurs tels que la composition chimique de l’atmosphère, la dynamique des grandes masses océaniques, les champs magnétiques produits par le « vent solaire » et la trajectoire parcourue par la Terre dans la galaxie, pour n’en citer que quelques-uns.

En Italie, ainsi que j’ai pu le constater à l’occasion de diverses rencontres au cours de ces dernières années, une bonne partie de la communauté scientifique pense comme moi. Le professeur Uberto Crescenti du Département d’ingénierie et de géologie de l’Université G. D’Annunzio a organisé, à Rimini en septembre 2009, un atelier intitulé « L’homme et le climat » lors de la conférence Geoitalia. La conclusion des travaux était la suivante : dans l’état actuel des connaissances, il est impossible de considérer l’homme comme étant la cause principale du changement climatique au cours des deux derniers siècles. En outre, de nombreuses études, notamment en géologie, attestent que des changements climatiques beaucoup plus conséquents que les changements actuels ont eu lieu bien avant que l’homme ne puisse avoir un impact significatif sur l’écosystème. Dès lors, il faut s’opposer aux politiques visant à réduire les émissions de dioxyde de carbone dans l’atmosphère.

De même, le professeur Ugo Bilardo, professeur de mécanique à l’Université de Rome, dans un discours sur les gaz à effet de serre (GES) au Congrès international « Ingénierie 2010 », a constaté que, jusqu’à présent, les efforts pour lutter contre le réchauffement de la planète se sont concentrés quasi exclusivement sur la réduction des émissions de CO₂, en négligeant les autres GES, les effets nocifs de la pollution de l’air et la question de l’efficacité énergétique.

Après la fin de mon mandat en tant que ministre de l’environnement, j’ai présidé « Italia Nostra », une association pour la sauvegarde du patrimoine historique, artistique et naturel. A ce titre, j’ai assuré la sauvegarde des paysages italiens et combattu l’éolien sauvage et industriel. J’ai résisté et j’ai tenu bon. J’ai subi la violence de la pensée unique, j’ai été vilipendé avec toute l’arrogance dogmatique du discours politiquement correct qui préconise le recours illimité aux énergies renouvelables et, en particulier, à l’éolien industriel. Le puissant lobby éolien, qui a fait son miel des subventions et des prix énergétiques politiquement imposés, a tenté de nous intimider, de nous submerger et de nous marginaliser.

Pour ces raisons, les 27 et 28 mars 2009 à Palerme, la Région Sicile, en collaboration avec l’Association de Notre-Italie et le Comité national du paysage et l’EPAW (la plateforme européenne contre l’éolien) a organisé la Conférence internationale « Le paysage sous attaque. La question de l’éolien ». La conférence a réuni des représentants des institutions et des chercheurs italiens et étrangers. Tous sont tombés d’accord, à l’instar de l’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing, sur le fait que le paysage naturel ne doit pas être dénaturé par les éoliennes et qu’il est nécessaire de forger des propositions alternatives en dénonçant les mensonges, les escroqueries, les fraudes, les impostures, et en rejetant – quand la chose est possible – les positions prises au siège de l’Organisation des Nations Unies qui sont manifestement douteuses et qui résultent probablement de la pression de certains Etats et de certains secteurs industriels.

7 réflexions sur « Une préface toujours d’actualité en 2024 »

  1. Mon action, au cours des trois années précédentes, avait consisté à positionner la Communauté européenne comme le leader de la politique environnementale…………………………………………….. cette proposition de taxe européenne, qui aurait permis de lutter contre le changement climatique au niveau macro-économique.
    ———————————————
    Je ne crois plus dans le dogme du réchauffement climatique causé par l’homme
    ———————————————————
    Dommage que ce Monsieur ne soit plus là pour répondre , car je pense que son retournement de veste est un peu tardif et malhonnête; il aurait dû le faire quand il était aux commandes et que les écolos ont compris comment s’imposer en politique
    Mais bon on en connaît d’autres qui ont retourné leur veste pareil, mais dans le sens contraire ; je suppose que vous savez de qui je veux parler : Monsieur Jouzel; mais tous ces gens ne font que ces gestes pour assurer leur carrière et paraître sur le devant de la scène

    1. Le 7 janvier 2024 à 15 h 41 min, fritz a dit :
      Comment peut-on faire de la pub pour un personnage qui écrit
      « » » » » » » » »Mon action, au cours des trois années précédentes, avait consisté à positionner la Communauté européenne comme le leader de la politique environnementale. ( en proposant ) une taxe européenne, qui aurait permis de lutter contre le changement climatique au niveau macro-économique. » » » » » »
      et qui peu avant de disparaître avoue
      « » » » » » »Je ne crois plus dans le dogme du réchauffement climatique causé par l’homme et, par conséquent, je ne crois plus à l’origine anthropique de l’effet de serre. » » » » » »

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      Le 7 janvier 2024 à 16 h 00 min,
      Nicolas Carras
      a dit :
      Ce qui est important dans l’histoire, ça n’est pas l’erreur commise, mais le fait de s’en être rendu compte, et d’avoir fait passer le message. C’est courageux et ça peut montrer l’exemple. Autrement posez la question directement à Science, climat et énergie, sous l’article.

      A++

      Si vous pouvez répondre à Nicolas Carras , merci

      1. Monsieur Carras a raison, il faut beaucoup de courage pour aller à l’encontre de la Pensée Unique. De nombreux scientifiques et même politiques sont plus que probablement dans le même cas, mais pour diverses raisons n’ont pas le courage de Monsieur Carlo Ripa di Meana.

          1. C’est vrai que la lumière pour beaucoup de ces personnages avant tout politiques n’est apparue que peu de temps avant leur mort; mais Nicolas , vous êtes jeune et je pense que vous avez de bonnes idées concernant la politique climatique ; mais ce que vous devriez comprendre c’est la manipulation de la population par les politiques pour leur tirer le maximum de pognon pour assurer leurs carrières

  2. L’air de Bruxelles produit parfois d’étranges métamorphoses. Lorsqu’il est nommé commissaire européen chargé de l’environnement, de la sûreté nucléaire et de la protection civile, le 1er janvier 1989, Carlo Ripa di Meana a du mal à cacher sa déception. Abandonner la culture, la télévision, et tout ce qui l’a fait vibrer pendant quatre ans au service de la Commission européenne ?  » Bien sûr, dit-il, j’avais un vieux flirt avec Italia Nostra et le WWF (Fonds mondial pour la nature). Mais l’environnement n’était pas ma tasse de thé.  »  » Ripa « , cependant, ne peut rien refuser à Jacques Delors, qu’il tutoie depuis le temps où, nouveaux venus à Bruxelles, ils se retrouvaient chaque mois à l’hôtel Amigo avec les amis du groupe appelé très vite  » Amigo « .
    https://www.lemonde.fr/archives/article/1990/01/16/m-ripa-di-meana-commissaire-charge-de-l-environnement-la-metamorphose-d-un-seducteur_3969687_1819218.html
    Concernant les gens qui retournent leur veste à cause des problèmes d’énergies et de pollution par le CO2 vous devriez faire un article concernant le nucléaire et le Président Macron qui a fermé Fessenheim suite aux décisions de Monsieur Hollande ; je me demande alors à quoi cela sert de voter pour un autre président
    Mais je vais transmettre ce message à Mr Nicolas Carras qui , s’il ne vient pas s’exposer ici , finira définitivement dans mes poubelles

  3. jene sais pas si quelqu’un reviendra encore une fois sur cet article ; mais entre temps j’ai réussi à me procurer non pas la préface de carlo ripa de meana au bouquin de Istvan Marko , mais son livre intitulé ADIEU LA TERRE, ecrit en 1993, livre qui vaut la peine d’être lu et qui vous fera comprendre entre autre la lutte contre les fossiles , le pétrole en premier pour combattre les émissions de CO2 et le réchauffement climatique anthropique
    fritz

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